dimanche 7 septembre 2014

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 30 journal Samuel Pepys ( Angleterre )


Frans Hals
                                                                                                                           1er septembre 1660
                                                                                                                            Samedi

            Ce matin je retins un bateau pour transporter les affaires de milord dans les Dwons lundi prochain. Puis chez milord à Whitehall où nous examinâmes les termes du brevet rédigé par l'homme de loi du Duc. Milord n'en paraît pas mécontent bien qu'ils soient en-deçà des termes que le Dr Walker avait proposés antérieurement.
            De là au Sceau privé pour voir comment les choses se présentaient. Il apparaît que Mr Baron a, en vertu d'un mandat impératif du roi, pris possession de la charge aux dépens de Bickerstaff, c'est très surprenant et nous sommes pleins d'étonnement car cela est une injustice flagrante.
            Mr Moore, moi et plusieurs autres invités par Mr Goodman et un de ses amis, nous dînâmes à la taverne de la Tête du Taureau du meilleur pâté de venaison que j'aie jamais mangé de ma vie, complété par un autre plat. Ce fut le meilleur dîner auquel j'aie jamais été convié. Au cours de la conversation, à table, une querelle opposa Mr Moore et le Dr Clarke. Le premier assurait qu'il était essentiel pour une tragédie d'avoir une intrigue authentique, le Docteur réfutait cette position et en appela à mon arbitrage. La cause sera tranchée mardi prochain, le matin au même endroit, autour des restes du pâté. Le perdant devra 10 shillings.
            Expédiai des dépêches à la flotte tout l'après-midi afin de préparer la venue de milord, et reçus ses instructions relatives à certains beaux meubles qu'il doit emporter à l'intention de la princesse.
            J'appris à ce sujet par Mr Towshend qu'en prévision de la venue du prince de Ligne, envoyé extraordinaire du roi d'Espagne, débutaient les plus grands préparatifs jamais prévus en Angleterre pour un ambassadeur.
            Tard à la maison. Me couchai l'esprit préoccupé par mon travail et aussi par la coquinerie de mon petit valet.


                                                                                                                     2 septembre
                                                                                                                     Dimanche
            A Westminster. Comme milord était déjà parti lorsque j'arrivai à la chapelle, moi et Mr Shipley comptâmes l'argent qui m'est dû et calculâmes le montant de mes honoraires du Sceau privé et des gratifications etc, jusqu'à ce jour en précisant la part qui revenait à milord et la mienne.
            Après quoi à la chapelle où j'entendis le Dr Ferne prêcher un bon et honnête sermon sur les paroles
" Le Seigneur est mon bouclier ".
            Après le sermon antienne médiocre, ensuite chez milord qui dînait dehors. Dînai avec Mr Shipley. Puis à Sainte-Marguerite où j'entendis un bon sermon sur les paroles " Apprends-nous le droit chemin " ou quelque chose d'approchant, dans lequel toutes les nouvelles doctrines politiques et religieuses qui ont été la cause de nos récentes divisions furent passées en revue.
            Après l'église chez Mrs Crisp ( j'envoyai William Hewer à la maison dire à ma femme que je ne rentrerai pas ce soir en raison du départ de milord tôt demain matin ). Je restai tard et leur offris abondance de vin car c'était le pot d'adieu de Laud Crisp. Je bus jusqu'à ce que la fille de la maison se montrât très gentille et affectueuse à mon égard. Je crains qu'elle ne soit pas aussi vertueuse qu'elle devrait l'être.
            Chez milord, et au lit avec Mr Shipley.


                                                                                                                           3 septembre

            Debout et aussitôt chez Mr..., l'orfèvre près de la nouvelle Bourse ( où j'ai acheté mon alliance ). Là, après beaucoup de difficultés je parvins à faire sertir en or le bijou que le roi de Suède a offert a milord, et d'où milord a retiré le portrait du roi. Il a l'intention d'en faire un ornement pour l'insigne de l'ordre de la Jarretière.
            Ce matin chez milord j'eus l'occasion de m'entretenir avec George Downing qui m'a promis de me libérer de mon engagement et de me payer pour mon dernier trimestre en mer afin que je puisse payer Mr Moore et Hawley.
            Vers midi milord prit congé du roi dans la galerie des Boucliers ( où je constatai l'affection du roi pour milord lors de l'accolade alors qu'ils se séparaient ), je l'accompagnai jusqu'à la voiture jusqu'à Lambeth où je pris congé alors qu'il se dirigeait vers les Downs. Cela son tout premier voyage en mer qui commença comme celui-ci au départ de Lambeth. L'après-midi avec Mr Moore pour établir nos comptes du Sceau privé. Il apparaît que la part qui échoit à milord s'élève à plus de 400 livres sterling et la mienne à 132 livres, sur lesquelles je lui rends pas moins de 25 livres pour sa peine, somme dont je pense il sera satisfait, mais mon coeur est rempli de joie. De là avec lui chez Mr Crew pour recevoir autant d'argent que nécessaire pour que nous soyons quittes lui et moi.
            A la maison. J'y trouvai Mr Cooke envoyé par milord pour que j'achète certains objets, un bonnet de saut de lit et un étui à peigne en soie qu'il souhaite utiliser en Hollande ( milord doit se rendre à La Haye ). Je vais m'y employer demain matin.
            Aujourd'hui mon père, mon oncle Fenner et ses deux fils sont venus visiter ma maison. Ma femme les a très bien reçus avec du vin et des anchois.
            Je n'ai pas pu me rendre au bureau et siéger en raison du départ de milord aujourd'hui.


                                                                                                                             4 septembre 1660

            J'accomplis plusieurs tâches ce matin avant de sortir ( comme surveiller les charpentiers qui posent le plancher de ma salle à manger ). Ensuite travail au bureau avec les deux sirs William, puis à Whitehall et à la taverne de la Tête du Taureau où nous mangeâmes les restes de notre pâté et où je rendis mon verdict sur notre pari de samedi dernier, donnant tort à Mr Moore. Le Dr Fuller nous rejoignit et confirma mon verdict.
            De là chez milord d'où j'expédiai avec Mr Cooke ses affaires. Puis à ma maison d'Axe Yard. Alors que je me trouvais devant la porte Mrs Diana passa. Je la fis entrer dans ma maison, l'emmenai à l'étage et là je badinai avec elle un grand moment et découvris qu'en latin " nulla puella negat ".
            Puis à la maison par le fleuve. Veillai tard à mettre de l'ordre dans mes papiers et dans mon argent, et à donner à ma femme sa leçon de musique à laquelle je prends grand plaisir.
            Ensuite, au lit.


                                                                                                                              5 septembre

            Au bureau.
            De là sur la requête des principaux officiers en voiture vers un des maîtres de la Chancellerie pour entendre le témoignage de Mr Sewel qui jura avoir entendu Phineas Pett proférer des paroles irrespectueuses à l'encontre du roi, il y a longtemps de cela.
            Au retour notre voiture eut une avarie. Stowell et moi allâmes chez Mr Rawlinson et après un verre de vin nous nous quittâmes. Au bureau puis à la maison pour dîner. J'avais renvoyé mon petit valet ce matin et son père le ramena, mais je donnai au père de telles preuves de la coquinerie du garçon qu'il ne put contester son renvoi. Je lui donnai donc 10 shilling pour la livrée que je lui avais fait faire et ils s'en allèrent. Je déchirai son contrat d'apprentissage.
            Réunion tout l'après-midi avec les principaux officiers chez sir William Batten à propos de l'affaire de Pett. Je rencontrai pour la première fois le colonel Slingsby qui possède maintenant un brevet de contrôleur de la marine. Nous n'aboutîmes à aucune décision. J'ai aujourd'hui pris connaissance de notre mandat m'habilitant à être juge de paix prêterai serment très bientôt.
            En fin d'après-midi, sur l'insistance de ma femme nous allâmes acheter un collier de perles qui coûtera 4 livres et 10 shillings. J'ai envie de lui faire plaisir pour la remercier de son soutien et aussi parce que depuis quelque temps j'ai de l'argent ( devant moi plus de 200 livres en espèces ).
            A la maison, achetai en chemin un lapin et deux petites langoustes, ma femme et moi soupâmes tard , puis au lit.
            Grande nouvelle aujourd'hui : le duc d'Anjou souhaite épouser la  princesse Henriette.
            On dit que Hugh Peters a été arrêté, que le duc de Gloucester est tombé malade et que les médecins pronostiquent la petite vérole.


                                                                                                                        6 septembre

            A Whitehall par le fleuve avec sir William Batten. Pendant le trajet il m'apprit que le commissaire Pett s'est remboursé lui-même de la réception qu'il a offerte au roi à Chattam lors de son retour et s'est alloué 20 shillings par jour pendant tout le temps de son séjour en Hollande, ce qui m'étonne. Je compris qu'il existe une grande jalousie entre les deux hommes.
            A Whitehall rencontrai le commissaire Pett qui me dit que Mr Coventry et Mr Fairbank, son avoué, sont fâchés. L'un se plaint de ce que l'autre lui prend des honoraires trop élevés, ce qui n'est que trop vrai.
            Il apparaît que le commissaire Pett est très mécontent et qu'il n'est pas disposé à dépenser beaucoup d'argent pour sa place, si bien qu'il est très désireux que je le soutienne quant à la somme que nous conviendrons de donner à Mr Coventry. Je le lui ai promis mais ne tiens pas à lier ma fortune à la sienne qui est en déclin.
            En fin de matinée nous nous réunîmes tous à l'Amirauté d'où nous devons prévoir l'approvisionnement des vaisseaux qui mouillent dans les Downs. Ce que nous fîmes. Mr Gauden promit de s'y rendre et de s'en occuper personnellement. Dîner William Hewer et moi chez milord d'un rôti que j'envoyai quérir par Mrs Sarah
            Puis à mon ancienne maison. J'envoyai tous mes livres chez milord afin de les faire porter dans la maison où j'habite maintenant. A la maison et au lit.


                                                                                                                          7 septembre

            Jour de bureau. Après dîner restai à la maison tout le reste de la journée. C'est le premier jour que je passe chez moi toute la journée depuis que je suis arrivé ici.
            Mis de l'ordre dans mes papiers, mes livres et autres affaires et écrivis des lettres. Aujourd'hui milord a quitté les Downs et a fait voile vers la Hollande.


                                                                                                                             8 septembre

            Encore toute la journée à la maison. Le soir sir William Penn m'envoya chercher. Je veillai tard avec lui à boire un verre de vin et à discuter. Je trouve que c'est un homme de très bonne compagnie, capable et très rusé.


                                                                                                                             9 septembre
                                                                                                                              Dimanche

            Le matin à l'église avec sir William Penn. Très bon sermon de Mr Milles.
            A la maison pour dîner avec sir William Penn qui partagea ce qu'il y avait. Ce fut très agréable car c'était la première fois qu'il voyait ma femme et ma maison depuis que nous étions installés ici.
            L'après-midi à l'église avec ma femme, après quoi à la maison où je me promenai dans le jardin avec le major Hart qui vint me voir. Il m'apprit que nous serons sans doute tous licenciés très bientôt, en conséquence je perdrai mes avantages comme officier du rôle. Après souper, au lit.


                                                                                                                               10 septembre

            Jour de bureau. La nouvelle nous parvint que le duc avait l'intention de rejoindre la flotte demain pour un jour ou deux afin d'accueillir sa soeur. Le colonel Slingsby et moi à Whitehall pensant proposer nos services au duc pour l'accompagner, mais nous rencontrâmes sir George Carteret qui nous renvoya en toute hâte louer deux ketchs dont le duc a immédiatement besoin. Nous rebroussâmes donc chemin et débarquâmes à la taverne de l'Ours au pied du pont où nous pûmes voir la foire de Southwark ( je n'avais quant à moi pas vu la foire St Bartholomew ) et ensuite au quai de la Tour où nous louâmes deux ketchs, puis au bureau où je trouvai sir William Batten en train de dîner avec quelques amis d'une belle échine de boeuf, que je partageai de bon coeur car j'étais affamé.
            A la maison où Mr Snow, que par la suite nous appelâmes lui aussi " cousin ", vint me voir, avec lui et Shelstonn un brave garçon qui cherche un emploi allâmes dans une taverne, restai tard. A la maison ayant trop bu et derechef au lit.


                                                                                                                               11 septembre

            Avec sir William Penn nous prîmes notre boisson du matin chez sir William Batten, de là durant une heure au bureau à expédier du travail.
           Dîner cher sir William Batten. Je me rends compte maintenant que nous risquons d'avoir de bonnes relations d'entente et de voisinage, mais coûteuses. Tout l'après-midi à la maison à surveiller mes charpentiers. Le soir invitai Thomas Hater à la sortie du bureau à venir bavarder à la maison. Après son départ je demandai à la servante de nettoyer les lambris du petit salon, tâche dont elle s'acquitta fort bien, mais qui nous occasionna à ma femme et moi bien du divertissement. Montai dans ma chambre lire quelques pages et rédiger mon journal pour les trois ou quatre jours écoulés.
            Aujourd'hui, à l'aube, le duc d'York est parti dans les Downs. Le duc de Gloucester est malade. Le Parlement devait clore sa session aujourd'hui, ne sais si cela fut fait.
            Au lit.


                                                                                                                             12 septembre 1660

            Jour de bureau. Ce midi j'espérais que mon cousin Snow et mon père viendraient dîner avec moi, mais comme il pleuvait beaucoup ils ne vinrent pas.
            Mon frère Tom est venu chez moi avec une lettre de mon frère John me demandant de lui envoyer certains ouvrages, " l'Anatomie de Bartholinus, les Antiquités Romaines de Rosinus et l'Astronomie de Gassendi ". Je lui donnai ce dernier ouvrage et une pièce de 10 shillings à remettre à mon père pour qu'il achète les deux autres.
            A la maison tout l'après-midi à surveiller les ouvriers qui travaillent chez moi et dont la paresse me contrarie beaucoup.
            Aujourd'hui clôture de la session du Parlement.


                                                                                                                             13 septembre

            Le vieil East vint me voir ce matin avec des lettres, lui offris une bouteille de bière de Northdown qui enivra quasiment le pauvre homme.
            L'après-midi ma femme alla à l'enterrement de l'enfant de ma cousine Scott. Il est à noter qu'en l'espace d'un mois ma tante Wight a donné naissance à deux filles, ma cousine Stradwick à une fille et un garçon, ma cousine Scott à un garçon et que tous sont morts.
            L'après-midi allai à Westminster où Mr Dalton était prêt avec son argent à me payer pour ma maison, mais comme les documents n'étaient pas rédigés cela ne put se faire aujourd'hui. Je rencontrai Mr Hawley qui déménageait ses affaires de chez Mr Bowyer où il logeait depuis assez longtemps. Les emmenai boire à la taverne du Cygne. Mr Hawley me donna une petite canne en jonc noire peinte et dorée.
            A la maison par le fleuve.
            Aujourd'hui le duc de Gloucester est mort de la petite vérole " par la grande négligence des médecins


                                                                                                                                14 septembre

            Jour de bureau. Je reçus un billet pour 42 livres et 15 shillings pour ma charge de secrétaire jusqu'au 4 de ce mois. C'est la dernière somme d'argent que je touche à ce titre.
            Ce midi ma femme est allée voir sa mère qui, m'a-t-on dit est très malade, ce dont mon coeur est affligé.
            L'après-midi Llewellyn vint chez moi et m'emmena à la taverne de la Mitre dans Wood Street où nous retrouvâmes Mr Stamford, William Symons et sa femme ainsi que Mrs Scobell, Mr Mount et Chetwin. Ce fut grande liesse tandis que Llewellyn était ivre et que je l'empêchais d'embrasser les dames, je ne me privai pas de les embrasser moi-même, avec allégresse. Nous nous quittâmes très tard. Ils regagnèrent Westminster en voiture, et moi à pied.


                                                                                                                               15 septembre 1660

            Réunion de bonne heure à notre bureau ce matin pour choisir les 25 vaisseaux dont les équipages seront licenciés les premiers.
           Après quoi à Westminster. Dîner avec Mr Dalton dans son bureau où nous eûmes un plat délicieux de viandes assorties. Mais comme nos papiers n'étaient pas prêts nous n'avons pu conclure et devrons attendre lundi.
           Mr Dalton et moi chez notre propriétaire Wanley avec qui nous convînmes que Dalton serait son locataire. Retour à Westminster où je rencontrai le Dr Castle qui me reprocha certaines erreurs dans mon travail au Sceau privé, entre autres pour n'avoir pas perçu de droits pour la nomination des six juges. Je ne savais pas quoi répondre tant que je n'avais pas parlé avec Mr Moore. Je fus très contrarié, craignis devoir débourser la somme moi-même. Passai chez mon père en rentrant et commandai des vêtements de deuil en raison du décès du duc de Gloucester. Je trouvai ma mère assez bien puis à la maison et au lit.

*   nature morte juan sanchez cotan
** autres Frans Hals
                                                                                         .........../ à suivre ...... 16 septembre 1660

                              Dimanche..............


         

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire